Publié le 21 Janvier 2020

Outre l'admiration et l'étonnement qu'ils suscitent, les samplers et les marquoirs anciens ont ce pouvoir de nous ouvrir les portes d'un autre monde, un monde où des petites filles (et même des petits garçons), parfois juste âgées de 7 ou 8 ans, brodaient, sur des toiles si fines qu'il nous faut une loupe pour en compter les fils, des chefs-d'oeuvre de patience et de raffinement. On les imagine souvent mal éclairées, clignant des yeux sur leur toile, mais remplies de fierté quand elles mettaient les dernières croix en signant leur ouvrage. Pour qui prend le temps de les déchiffrer (Meriem est très forte à ce jeu-là !), ces samplers savent raconter des histoires : là un texte, ici un motif, et comme Alice passant à travers le miroir, on pénètre à pas feutrés dans un univers qui n'a quelquefois rien de très enfantin.

Antique samplers have the stunning ability to arouse admiration and amazement alike. They are also a gate to a different world entirely, a world where little girls (or boys!), sometimes no older than 7 or 8, would patiently embroider refined masterpieces on such delicate linen that a magnifying glass is needed to count the threads. It is tempting to conjure up pictures of these children getting eyestrain in poorly lit rooms, ultimately proudly handing over to their parents their finished pieces. These samplers tell stories, provided you take the time to listen to them(what Meriem does). Your eyes catch a text, a motif, and you find yourself gingerly stepping through the looking glass like Alice into a world sometimes very far from a childlren's story.

 

Voici Jane Brown. En 1802, âgée de 11 ans, Jane met les dernières croix sur son sampler. Sa famille est sans doute assez aisée car elle a brodé son ouvrage en fils de soie. 

Meet Jane Brown. In 1802, aged 11, Jane worked the last stitches on her sampler. Her family was obviously well-off enough to afford a few yards of silk threads.

La composition en est classique : un texte et des motifs de fleurs, de paniers de et petits animaux, disposés symétriquement, et enfin au centre la signature de l'artiste. Autour, comme il est de coutume, une frise de fleurs, mais celle-ci a la particularité de ne pas être répétitive et d'utiliser des points de broderie traditionnelle.

The canvas displays various classic designs laid out quite symetrically under a text and the stitcher's signature in the center. The customary frieze of flowers circling the sampler was worked using traditional embroidery stitches and changes from the usual repetititive friezes.

 

 

 

Jane a brodé son ouvrage sur une toile si fine qu'elle a dû, en cours de route, doubler son travail d'un morceau de batiste. Elle a donc d'abord brodé le texte et les motifs au point de croix, puis la frise de fleurs en broderie traditionnelle une fois son ouvrage doublé, et elle a sans doute terminé par la petite branche centrale, son nom, son âge et la date. Ça, c'est le dos qui nous l'apprend !

Jane began stitching on a very sheer linen, to such an extent that she as obliged to line her work with a fine cotton cambric to be able to embroider the frieze. A wee keek at the back of the sampler is enough to guess that she embroidered the text, her name and the crosstitched motives first; then once the linen was lined, she worked the frieze, the small vine under the text, and probabaly ended with her name, age and the date of completion.

 

Pour finir, quelques points (des initiales ?) ont été ajoutés au dos, en haut à droite. Il s'agit d'un fil rouge en coton, cette couleur n'est pas utilisée dans l'ouvrage de Jane, le fil est partiellement visible sur l'endroit et il recouvre la fleur jaune. C'est vraisemblablement un ajout ultérieur, peut-être une marque de collection ?

At the top right corner of the back, one can notice a few additional stitches, using a red cotton thread that does not appear elsewhere in Jane's sampler. It is noticeable also on the right side (top left corner), partly overlapping the yellow flower. These stitches (initials?) were presumably added later, and could be a collector's mark.

 

Les samplers anglo-saxons ont la particularité de présenter des textes brodés, religieux souvent, moralisateurs encore plus fréquemment. Il est toujours amusant d’essayer d'en identifier la provenance (merci l'Internet et l'accès en ligne aux anciens ouvrages numérisés !), d'autant plus qu'ils peuvent se révéler précieux pour en savoir un peu plus sur nos petites brodeuses (voir Mary Glover par exemple). Alors que nous apprend le texte choisi par Jane ?

A specific trait common to most anglo-saxon samplers is the presence of embroidered texts. These are often religious quotations, though not always, and most of the time they convey a moralistic message. It is rather fun to try and identify the sources (praised be the Internet and the online access to numerized ancient publications), all the more so since they provide a valuable insight into the world of these young stitchers (see Mary Glover for instance). So what can we learn from Jane's choice?

Visiblement nous avons affaire à un fragment de poème. Le poème est publié in extenso dans un ouvrage de l'Anglaise Dorothy Kilner (1755-1836), connue également sous le pseudonyme de Mary Pelham et qui fut une prolifique auteur pour enfants. Le livre en plusieurs volumes (le poème est dans le volume III) s'intitule Dialogues and letters on morality, oeconomy and politeness for the improvement and entertainment of young female minds (Dialogues et lettres sur la moralité, l'économie et la politesse pour le développement et le divertissement des jeunes esprits féminins), publié à Londres en 1780. Il se présente sous la forme de dialogues et de lettres échangés entre la jeune Harriot Seamore et sa maman (Mary Seamore, 'Mamma'), sa grand-mère Mrs Harcourt, sa sœur Elizabeth (Betsey) et sa tante Mrs Bartlate. À travers ces échanges ponctués d’anecdotes et de petites histoires très morales, mais volontairement divertissantes car pour l’auteur, c’est ainsi que l’éducation est plus efficace, la jeune Harriot apprend à travers l’enseignement de ses sages aînées les bons usages, les bonnes manières, la valeur du travail et de la vertu, etc. Le poème apparaît dans une lettre d'Harriot à sa tante, dans laquelle elle lui raconte qu'alors qu'elle avait déchiré sa robe en jouant, sa mère ne la gronde pas, mais lui demande de la raccommoder. Ce qui provoque chez Harriot, qui déteste repriser, une crise de larmes... Toutefois sa mère insiste sur la fait qu'elle doit le faire, et plus tard lui fait passer par la bonne Betty un long poème écrit à son intention, dans lequel, tout en la réconfortant, elle lui explique, en substance, que si les larmes sont utiles pour des choses graves, il ne faut pas pleurer pour des futilités et au contraire affronter les petites contrariétés avec vertu et noblesse d'âme (tout ça sur 5 pages). 

Clearly it sounds like a poem of some sort. So I did my research and found out that the whole poem was published in a book by Dorothy Kilner (1755-1836), aka Mary Pelhman, a prolific English writer of children's books. The 'Dialogues and letters on morality, oeconomy and politeness for the improvement and entertainment of young female minds' was published in London in 1780 in several volumes. The protagonists are young Harriot Seamore, her mother Mary Seamore (Mamma), her sister Betsey, her grand-mother Mrs Harcourt,  and her aunt Mrs Bartlate. Through a series of dialogues and letters between these women, in which are told various anecdotes and very moral stories, young Harriot learns from her wiser elder how to be in the world, to behave virtuously, the value of work and virtue, etc. For the author, education is better paired with a measure of entertainement, since the latter makes education more efficient. The poem appears in the third volume, in a letter from Harriot to her aunt Mrs Bartlate, in which she tells her of how, as she had torn her frock at play, her mother does not dress her down, instead she asks her to darn it. Young Harriot hates darning, so she begins to cry, upon which her mother insists on her doing as she is told. Later, Mamma sends her a five-page long poem of her own in which, while conforting her daughter, she tells her that (in a nutshell) crying should be reserved for serious matters and trifles should be dealt with with virtue and a noble soul.

 

Les quelques vers choisis par Jane pour son sampler sont à la fin du poème. Jane aimait-elle particulièrement cet ouvrage ou ce poème, l'a-t-elle choisi délibérément ou lui a-t-on soufflé l'idée ? Peut-être le connaissait-elle, presque par cœur, car en le brodant elle a oublié deux vers...

The few verses that Jane chose for her sampler sit towards the end of the poem. Was Jane particularly fond of this book, or this poem, did she choose it deliberatly or was it someone else's suggestion? Maybe she loved and knew this poem almost by heart actually, since she forgot two verses in her stitched version...

 

[...] Go then, my child, and still whate'er thou do

With steadfast step fair Virtue's path pursue:

In each event still let her by thy guide,

Not for a moment deviate from her side,

In each event her still small voice attend

And let her be thy first, thy dearest friend,

Follow her steps and she will tread that road

Which leads thro' nature up to nature's God [...]

 

On peut supposer que la petite Jane aura elle aussi suivi le chemin de la vertu...

Young Jane certainly followed Virtue's path herself...

 

Je reviendrai sur ce livre plus tard, car j'y ai trouvé un intéressant passage sur... les samplers brodés ! A très vite !

I'll come back later on that book, I found an interesting mention of... embroidered samplers! Stay tuned!

Voir les commentaires

Rédigé par Emmanuelle

Publié dans #Marquoirs anciens

Publié le 12 Janvier 2020

On ne présente plus le célèbre modèle islandais Riddari ! Enfin, si, on peut quand même ! wink Il s'agit d'un modèle créé par  Védís Jónsdóttir, et une rapide recherche sur Ravelry ou sur internet en général vous plongera dans un monde de jacquard coloré et laineux. En voilà ma version (taille homme, XL).

Is it still necessary to introduce you to the famous Riddari icelandic sweater? Maybe it is, so I'll gladly let you know that the pattern was created by  Védís Jónsdóttir. A quick glimpse at Ravelry or at Internet images will enable you to dive into a wooly world of deliciously stranded-colored yokes. So I made one too (man size, XL).

 

 

Le modèle en français est disponible chez Triscote

Pattern available at Ravelry in various languages.

 

Tricoté en Lettlopi de Istex (bleu fjord, orge, anthracite et naturel), en rond depuis le bas selon la méthode islandaise traditionnelle. La laine vient aussi de chez Triscote. C'est chaud, et ça gratte comme il faut !

The sweater is knit in the round and bottom up according to the traditional icelandic technique, using Lettlopi yarn by Istex (purchased at Triscote together with the pattern in French) in Fjord blue, black heather, white and barley. Warm and itchy!

 

 

 

 

 

Pour finir, je voudrais remercier les quelques personnes qui ont eu la gentillesse et pris la peine de laisser un petit mot sous le précédent post...

I also would like to thank the (very) few persons who were kind enough and took the time to leave a lovely comment under the previous post...

 

A très vite !

Voir les commentaires

Rédigé par Emmanuelle

Publié dans #Tricot

Publié le 1 Janvier 2020

Une très belle et heureuse année à tous ! 

A very happy New Year to all!

 

 

Voir les commentaires

Rédigé par Emmanuelle

Publié dans #Divers